EXTRAIT DU TOUR DE FRANCE 2020 IMAGINÉ CHAPITRE 22

Publié le par Cédric et Patrick BERNARD

EXTRAIT DU TOUR DE FRANCE 2020 IMAGINÉ CHAPITRE 22

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             En 1975, pour TF1 tout juste désolidarisée d’Antenne 2, Daniel Pautrat était épaulé par Roger Pingeon, dauphin du Belge au Tour 1969. À Pra-Loup, les deux hommes sont installés devant une planche posée sur deux tréteaux. Dans un espace confiné, ils sont accompagnés d’un technicien et positionnés à côté de confrères face à la ligne d’arrivée. La planche est enchevêtrée de câbles, un gros poste de télévision et divers matériels. En bruit de fond de leurs commentaires, on perçoit ceux de confrères (en différentes langues) et des cris du public. L’ambiance est kitsch. Pour le bonheur des téléspectateurs, la moto-caméra suit Eddy Merckx dans son numéro d’équilibriste le long du Ravin des Agneliers. Pingeon décrit avec admiration et précision la technique de son ancien équipier – en 1966-67, les deux coureurs étaient chez Peugeot, dont le directeur d’équipe Gaston Plaud commit l’erreur de ne pas souhaiter garder le très prometteur jeune Belge, qui demandait l’embauche de deux compatriotes.

          Dans ses éclaircissements expertisés, Roger Pingeon insiste, question d’époque, sur la contrainte des trous et des gravillons dans la définition d’« une trajectoire au millimètre » qui combine tracé au cordeau et slalom d’obstacles. Trop heureux de tenir la parole au volubile Pautrat, le Bressan se hâte à glisser une conclusion pessimiste : « Merckx effectue un travail d’artiste. Dans ce domaine-là, il est vraiment imbattable. Thévenet n’a pas réussi à le décramponner dans le Col des Champs. Merckx a sauté sur l’occasion de la descente. Malheureusement, Thévenet risque de faire les frais de cette descente. »

          Mais Pautrat n’a pas bien écouté ! Micro ressaisi (il s’agit d’une image, chacun à ses propres micro et casque), il reprend à son compte les propos du vainqueur du Tour 1967 en les faisant passer d’hypothétiques à certains, de pessimistes à déprimants : « L’attaque de Thévenet au Col des Champs a échoué. Le contre de Merckx sur la fin va être payant. ». À demi-mots, il a conclu : l’étape est terminée, le Tour est terminé, Rideau ! Il aurait pu ajouter : le cyclisme est un sport qui se joue à 150 et à la fin c’est Merckx qui gagne. Un peu plus tard, il dénonce les « risques insensés » pris en descente par Gimondi et Merckx.

        

         Des mois plus tard, le Belge opposera à un journaliste cette stupéfiante réponse : « Je n’ai jamais raté un virage. »

Publié dans Extrait

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